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Pourquoi le rallye boursier européen pourrait ne faire que commencer
Jul 22, 2025 10:02 AM

L’Europe. Ce n’est pas exactement le premier nom qui vient à l’esprit des investisseurs lorsqu’ils pensent à un « leader de marché », n’est-ce pas ? Depuis une décennie, elle joue le rôle de figurant pendant que la tech américaine occupe le devant de la scène. Mais en 2025 ? Quelque chose a changé. Les actions européennes s’envolent, et cette fois, ce n’est peut-être pas un faux départ.

Commençons par les valorisations. Les actions européennes s’échangent encore avec une décote de 35 à 40 % par rapport aux actions américaines sur la base du ratio cours/bénéfices prévisionnel. L’indice MSCI Europe affiche environ 15× les bénéfices futurs, contre environ 22× pour le S&P 500. Les rendements de dividendes racontent une histoire similaire : plus de 3,0 % en Europe contre environ 1,25 % pour le S&P. Les investisseurs paient moins, mais sont mieux rémunérés pour leur patience. Ce n’est pas un terrain de jeu pour les chasseurs de croissance, mais pour ceux qui cherchent des revenus ou un retour à la moyenne, c’est attrayant.

Ratios cours/bénéfices prévisionnels par région (juil. 2025)

Source : LSEG Datastream, Yardeni Research. Tous les indices sont en rendement total en dollars américains. Les performances passées ne préjugent pas des performances futures. Données au 22 juillet 2025.

Les actions européennes (UEM : 15×) s’échangent avec une décote de 36 % par rapport aux actions américaines (22×) — un écart de valorisation proche de ses extrêmes historiques.

Ajoutons maintenant l’élan macroéconomique. L’inflation de la zone euro est tombée à 2,3 % en juin, contre plus de 10 % fin 2022, offrant à la BCE une marge de manœuvre pour baisser ses taux. Elle les a déjà abaissés à quatre reprises depuis mi-2024, faisant passer le taux de dépôt de 4 % à 2,0 %, et les marchés anticipent deux nouvelles baisses d’ici la fin de l’année. Pendant ce temps, l’Allemagne, traditionnellement perçue comme un faucon budgétaire, adopte une position plus souple. Le budget 2025 de Berlin prévoit 60 milliards d’euros de relance, avec une forte orientation vers l’énergie, la numérisation et la défense. Ce n’est certainement pas un petit changement !

Évolution du taux de dépôt de la BCE (fév. 2023 – juin 2025)

Source : Banque centrale européenne. Tous les indices sont en rendement total en dollars américains. Les performances passées ne préjugent pas des performances futures. Données de juin 2025.

Après un pic à 4,0 % fin 2023, la BCE a réduit son taux de dépôt de 200 points de base pour le ramener à 2,00 % — et de nouvelles baisses sont attendues au second semestre 2025.

Le PMI composite de la zone euro est passé au-dessus de 50 en juin, première lecture en territoire expansionniste depuis près d’un an. L’Allemagne et l’Italie, souvent vues comme un poids mort économique, ont surpris positivement au trimestre. La Commission européenne prévoit une croissance de 1,1 % pour la zone en 2025 — modeste certes, mais une amélioration par rapport à la stagnation de 2023–2024.

Et il y a aussi le sentiment. Après des années de désintérêt, l’Europe attire enfin des capitaux frais. Les flux nets vers les ETF d’actions européennes ont dépassé 16 milliards de dollars au T1 2025, soit le meilleur démarrage d’année depuis 2006. Les gestionnaires de fonds américains, généralement réticents à sortir de la Silicon Valley, y reviennent. Morgan Stanley et JPMorgan ont chacun publié des notes favorables à l’Europe ce printemps. Même Goldman Sachs a relevé son objectif pour le MSCI Europe de 8 %, citant un « potentiel haussier basé sur la valorisation et un mélange politique favorable ».

La composition sectorielle joue également en sa faveur. Le S&P 500 est composé à plus de 30 % de technologies, alors que le MSCI Europe ne l’est qu’à environ 7 %, avec une surpondération dans les banques, l’énergie, l’industrie et la santé. Cette répartition, autrefois perçue comme un handicap, devient aujourd’hui un atout. Les financières mènent la danse en 2025, portées par des marges accrues et des bilans solides. Les services publics et l’industrie progressent également grâce aux dépenses d’infrastructure et aux politiques énergétiques.

Bien entendu, tout cela n’est pas sans risque. La guerre en Ukraine se poursuit. L’Europe reste fragmentée politiquement. Et si la tech américaine redémarre, les flux pourraient rapidement s’inverser. De plus, les problèmes structurels à long terme comme le vieillissement démographique et le sous-investissement dans l’innovation persistent.

Mais voilà l’essentiel : l’Europe n’a pas besoin d’être parfaite. Elle doit juste faire mieux que ce que le marché a anticipé. Et en ce moment, c’est le cas.

Après une décennie sur la défensive, l’Europe bénéficie enfin d’un vent favorable — des taux plus bas, des bénéfices plus élevés, et une attention mondiale croissante. Pour les investisseurs souhaitant se diversifier loin de la croissance surchargée des États-Unis, le moment est peut-être venu de redécouvrir le Vieux Continent. Ce n’est pas le pari le plus tape-à-l’œil du marché. Mais parfois, c’est justement là que naissent les meilleures histoires.